Savez-vous comment la joie est arrivée sur la Terre ? Je vous emmène en Laponie avec ce conte d’origine sámie. Une histoire pour enfants sur les émotions: LA JOIE
Beivi est la fille unique du Soleil. Pleine de vie, joyeuse et d’un naturel curieux, Beivi aime observer la terre, d’en haut. Quand son père n’était pas avec elle, elle se baladait du côté du Grand Nord, en Laponie ou au Groenland. Fascinée par les couleurs de l’arc-en-ciel, elle aime se faufiler sous la couche terrestre et provoquer ce phénomène climatique magnifique que sont les aurores boréales. Offrir de belles couleurs aux hommes… Car Beivi aime les Hommes et elle aime leur faire plaisir. Et ce qu’elle désire par-dessus tout, c’est aller vivre auprès des Hommes, afin de mieux les connaître et pour apporter de la joie dans leur vie. Car, comme le dit candidement Beivi, "c’est triste d’être triste".
Un soir, Beivi avoue à son père son souhait d’aller vivre chez les Hommes. Le Soleil, étonné par cette demande incongrue, tente tout d’abord de la raisonner, argumentant qu’elle a tout au ciel pour être heureuse. Voyant la détermination de sa fille, le Soleil, bien que renfrogné, accède à la demande de Beivi. Et le lendemain matin, cette dernière se réveille dans une kata, une habitation du peuple sami. C’est alors qu’une vieille femme et un vieil homme rentrent dans la pièce dans laquelle Beivi s’est réveillé. Une fois passée la stupeur de voir une jeune fille allongée sur le lit de cette chambre pourtant toujours vide, ils s’approchent de la jeune fille, au regard pétillant. "Je voudrais que vous m’adoptiez", s’exclama la jeune fille avant qu’ils n’aient pu dire quoi que ce soit. Comment ne pas dire oui à cette petite fille souriante, au regard d’un bleu profond et ses joues toutes roses. Et la vie reprend son cours, Beivi illuminant la vie du couple qui l’avait recueillie.
Si la compagnie de ses parents d’adoption est agréable, Beivi n’en oublie pas la "mission" qu’elle s’était donnée, aller à la rencontre des Hommes et leur apporter de la joie. Mais la Soleil, en père protecteur, l’avait envoyée dans une kata située sur un petit îlot au milieu d’un grand lac gelé. Elle ne risquait pas de rencontrer beaucoup de monde. Ses parents lui demandent de patienter, jusqu’à ce qu’elle ait l’âge de revêtir la robe et la coiffe des jeunes filles. Beivi s’exécute avec le sourire et aide ses parents dans les tâches ménagères. Lorsque ce jour arrive enfin, Beivi est si contente qu’elle entonne un chant profond, qui touche au plus profond de l’âme.
Les parents adoptifs de Beivi, portés par ce doux chant, ont le cœur rempli de bonheur. Et ce bonheur que leur a procuré cette petite fille, ils veulent le partager. C’est pourquoi, le lendemain, ils accèdent enfin à la requête de Beivi, et l’emmènent à la rencontre des humains. Beivi est aux anges, elle a préparé des sacs remplis de pierres, de fils de soie et de fruits, des petits trésors qu’elle avait amassés au fil du temps, en prévision de sa rencontre avec les Hommes. Et cette rencontre dépasse amplement ses attentes. Dès que Beivi rentre dans la kata du premier village, une vague de lumière emplit les cœurs des villageois. Beivi prend les mains des enfants, les emmène dehors et se met à danser et à chanter. Une joie communicative se répand dans tous le village et très vite, tout le monde danse et chante autour d’elle. C’est une sensation nouvelle pour ces villageois, ils ne connaissaient pas cette impulsion joyeuse qui s’empare d’eux. Et c’est ainsi que pendant des lunes – et des soleils – Beivi côtoie et vit parmi les hommes, leur apprenant à rendre les choses plus colorées, plus heureuses. A son contact, les hommes apprennent le bonheur des choses simples. Et lorsqu’ils partent à la chasse ou à la pêche, on les entend fredonner gaiement les chants que Beivi leur avait appris.
Un bonheur et une joie contagieuse qui ne plaît pas à tout le monde. Quelques habitants de quelques villages commencent à se méfier de cette jeune fille et de cette joie qu’elle propage autour d’elle. Ces chants et ces danses ne sont pas utiles pour notre travail, critiquent certains villageois. Colère, envie et jalousie, ces sentiments qu’elle avait observés tout en haut, Beivi les retrouve chez certains villageois. Ces derniers semblent bien décidés à se débarrasser de Beivi, et se rendent pour ce faire chez un sorcier. Le sorcier, qui se complaît dans la noirceur et l’obscurité, trouve dans la requête des villageois un moyen idéal de se venger du Soleil. Car il sait que Beivi est la fille de l’astre brillant. Il conseille aux villageois d’enfermer Beivi dans une kata, et de boucher le puits de lumière qui laisse échapper la fumée du feu. Une fois la jeune fille à leur merci, il leur suffira de jeter sur elle une pierre moussue pour qu’elle disparaisse. Les villageois, empressés d’accomplir leur noir dessein, enferment Beivi dans sa kata mais, dans l’empressement, oublient de fermer le puits de fumée. Les villageois jettent une pierre sur elle. Beivi pâlit mais rassemble ses dernières forces pour lancer un dernier chant, une musique plus belle et plus ample que celles qu’elle avait pu donner jusque-là. Une musique de générosité éternelle. Et une fois son chant terminé, Beivi s’envole en fumée, en spirale de feu et disparaît à travers le puits de fumée, resté ouvert.
Depuis ce jour, Beivi n’est plus jamais revenue sur terre, mais sa mémoire demeure à travers les chants et les danses du peuple sámi. Et c’est ainsi que la joie est venue au monde.
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